Les vœux pour 2020 de Martin MALVY, président de Sites & Cités

29 Jan 2020

« Madame, Mon­sieur les élus, chers collègues,

Cher Yves Dauge, Cher Michel Bou­vard, je n’oublie pas Jean Rouger, Les com­pagnons de la 1ere heure.

Nous fêtons les 20 ans de notre asso­ci­a­tion. 20 ans ! c’est l’âge de la majorité passée.

Notre asso­ci­a­tion a aujourd’hui pignon sur rue. Son suc­cès transparait dans le nom­bre de ses adhérents : Nous étions une ving­taine en 2000, et nous comp­tons aujourd’hui 265 villes et ter­ri­toires, soit 1865 com­munes abri­tant 13 mil­lions d’habitants. Notre asso­ci­a­tion a su impos­er la per­ti­nence de ses démarch­es tant auprès des pou­voirs publics que des divers­es instances publiques ou privées dédiées aux pat­ri­moines, à sa val­ori­sa­tion, à sa préser­va­tion et à l’économie touristique.

20 ans durant lesquels nous avons fait la démon­stra­tion avec nos mem­bres que les pat­ri­moines con­stituent une ressource incon­tourn­able pour redonner vital­ité et attrac­tiv­ité à nos villes et à nos ter­ri­toires. Et si l’on par­le davan­tage de pat­ri­moine urbain, de cen­tres anciens à réanimer, nous revendiquons une part de la prise de con­science. Aujourd’hui parte­naire de nom­breux min­istères, insti­tu­tions, asso­ci­a­tions et col­lec­tiv­ités ter­ri­to­ri­ales, Sites & Cités par­ticipe à la réflex­ion et à la pro­gram­ma­tion des grandes col­lec­tiv­ités ou min­istères qui ont souhaité col­la­bor­er avec elle. Souhaitons que nous soyons de plus en plus nom­breux à partager et à porter une ambi­tion forte sur les enjeux autour des patrimoines.

Je le dis­ais il y a quelques instants, la prob­lé­ma­tique des cen­tres anciens est aujourd’hui mieux recon­nue et com­prise. Bon nom­bre d’entre nous se sont inquiétés à juste titre des dif­fi­cultés engen­drées par une métrop­o­li­sa­tion galopante qui affaib­lit les villes petites et moyennes et con­tribue à la déstruc­tura­tion de la société comme si, fon­da­men­tale­ment et au-delà du dis­cours, la vraie poli­tique de la ville était celle de la grenouille qui veut se faire aus­si grosse que le bœuf. Les métrop­o­les ont leurs pro­pres prob­lèmes, mais les villes moyennes et les petites villes sont aujourd’hui men­acées d’un affaib­lisse­ment pro­gres­sif. On y con­state une vacance accrue des loge­ments pour­tant situés dans des immeubles de qual­ité mais peu à peu dégradés ; les com­merces se sont à leur tour affaib­lis, face à la pro­liféra­tion des grandes sur­faces et aujourd’hui du e‑commerce ; la ville, vic­time de la mon­di­al­i­sa­tion et d’intérêts privés dont on n’imaginait pas l’ampleur et le pou­voir il y a quelques décennies.

Con­séquence : les pop­u­la­tions de quartiers affaib­lis se sen­tent, elles aus­si, oubliées.

Nous n’avons cessé de dire ces men­aces sur les cen­tres anciens. Le con­stat n’est pas nou­veau. À par­tir du moment où tout le monde déclare sa com­préhen­sion du prob­lème, la ques­tion est de savoir si pou­voir pub­lic et organ­ismes parte­naires seront à la hau­teur des enjeux et ont véri­ta­ble­ment l’ambition de con­stru­ire des poli­tiques rétab­lis­sant peu à peu des équili­bres détru­its. Les adhérents de Sites & Cités sont en tête du com­bat et chaque jour, font la démon­stra­tion qu’il n’y a pas de fatal­ité, même si les réus­sites sont divers­es. « Action Cœur de Ville » en 2018, les Opéra­tions de Revi­tal­i­sa­tion des Ter­ri­toires, et bien­tôt le pro­gramme « Villes de demain » doivent être au ser­vice d’une poli­tique glob­ale de relance des cen­tres en difficulté.

Je souhaite que notre volon­té partagée avec nos parte­naires, Min­istère de la Cohé­sion des ter­ri­toires, Anah, Agence Nationale de Cohé­sion des Ter­ri­toires, et les Étab­lisse­ments Publics Fonciers, de revi­talis­er durable­ment nos villes et ter­ri­toires affaib­lis par tant d’années d’oubli, aboutis­sent à un ren­verse­ment de ten­dance et que le pat­ri­moine, qu’il soir urbain, rur­al, de cen­tres-villes ou cen­tres-bourgs, soit vu comme un atout puis­sant pour l’amélioration du cadre de vie, l’économie, le développe­ment durable, la mobil­ité, la sol­i­dar­ité ter­ri­to­ri­ale, et non comme une con­trainte. Je souhaite évidem­ment que les crédits soient à la hau­teur des ambi­tions des dif­férents pro­grammes. C’est ce que l’on dit sou­vent et frôle la banal­ité. Mais le Mal­raux ne coûte plus 30 mil­lions par an à l’État alors qu’il est essen­tiel aux cen­tres anciens, quand le Pinel et le Denor­mandie absorbent annuelle­ment plus du mil­liard d’euros.

Nous arrivons, je l’espère, à la fin du cycle lég­is­latif qui a rebâti les prob­lé­ma­tiques autour des cen­tres anciens. Sans doute n’aurons-nous pas de nou­veau cycle lég­is­latif de sitôt. La loi rel­a­tive à la lib­erté de la créa­tion, de l’architecture et du pat­ri­moine (LCAP) de 2016, puis la loi ELAN, ont remod­elé nos out­ils d’urbanisme pat­ri­mo­ni­al. Je forme au nom de Sites & Cités le vœu que les out­ils créés qui con­stru­isent une poli­tique nationale, aux mains des acteurs locaux, ne soient pas remis en cause par une nou­velle lég­is­la­tion ou règle­men­ta­tion qui abouti­rait à autant d’interprétations qu’il existe de régions sur des sujets qui exi­gent une recon­nais­sance nationale. Nous souhaitons que les procé­dures de créa­tion des « Sites pat­ri­mo­ni­aux remar­quables » soient facil­itées, que les révi­sions néces­saires soient engagées, que les aides aux espaces publics soient accrues – la ville doit devenir désir­able — , que les crédits d’études néces­saires à la con­nais­sance des quartiers anciens soient reval­orisés. Je souhaite que les avan­tages fis­caux et les aides à la restau­ra­tion soient majorés, sta­bil­isés dans le temps et mieux ciblés vers les « quartiers pri­or­i­taires du patrimoine ».

Je salue le Min­istère de la Cul­ture présent lors de notre créa­tion en 2000 à l’Assemblée Nationale. Nous n’avons cessé d’échanger avec ses ser­vices cen­traux et départe­men­taux, ces derniers représen­tent l’interlocuteur le plus fam­i­li­er de l’action munic­i­pale. Nous avons défendu ces « Unités – UDAP » à maintes repris­es dans leurs prérog­a­tives et dans le rôle indis­pens­able des Archi­tectes des bâti­ments de France et de l’avis « con­forme ». Mais je mets en garde celles et ceux qui enten­dent que le pat­ri­moine de nos villes con­tin­ue à les iden­ti­fi­er sur l’affaiblissement de ces unités départe­men­tales. Je souhaite que ces acteurs qui accom­pa­g­nent les col­lec­tiv­ités au quo­ti­di­en puis­sent con­tin­uer à exercer leurs fonc­tions auprès des col­lec­tiv­ités et qu’ils soient en nom­bre suff­isant. Je leur souhaite d’être soutenus à la hau­teur de nos attentes.

Nous sommes l’Association des « sites pat­ri­mo­ni­aux remar­quables » et des « Villes et Pays d’art et d’histoire ». Label insti­tué il y a 35 ans et qui compte aujourd’hui 265 ter­ri­toires, il doit être un out­il pour le développe­ment des ter­ri­toires à par­tir des pat­ri­moines. Je viens de le dire. Nous voulons, nous souhaitons, le main­tien de la dimen­sion nationale du label. Et que l’on ne prof­ite pas de pro­jets de décen­tral­i­sa­tion pour décon­stru­ire sa dimen­sion nationale. Il perdrait tout son sens en per­dant ce qu’il porte aujourd’hui de références recon­nues quelle que soit sa sit­u­a­tion géographique.

Notre action sur la val­ori­sa­tion des pat­ri­moines sus­cite l’intérêt au-delà de nos fron­tières. Depuis l’origine, le Min­istère de l’Europe et des Affaires Étrangères est un de nos plus impor­tants parte­naires. Avec son sou­tien et celui du Min­istère de la Cul­ture, nous avons répon­du aux mul­ti­ples deman­des de coopéra­tion sur les ques­tions de restau­ra­tion, d’études et d’inventaire du pat­ri­moine archi­tec­tur­al et urbain, sur le développe­ment de poli­tiques du tourisme durable et de mise en réseau des col­lec­tiv­ités dans de nom­breux pays. Dans un con­texte inter­na­tion­al de plus en plus com­plexe et dif­fi­cile, je for­mule le vœu que nous puis­sions pour­suiv­re nos coopérations.

En matière de Développe­ment durable, nous parta­geons depuis des années notre point de vue sur l’écologie urbaine et archi­tec­turale avec la Caisse des dépôts, avec qui nous avions engagé, il y a plus de dix ans, des études appro­fondies sur la tran­si­tion énergé­tique pour faire des « quartiers anciens des quartiers durables ». Nous avons été pio­nniers. Nous le sommes restés.

Ces enjeux sont essen­tiels. Je souhaite que le cer­cle for­mé sur ce thème, avec le CEREMA, Maisons paysannes de France, la CAPEB, les écoles d’architecture et d’ingénieurs, l’association des archi­tectes du pat­ri­moine, le Min­istère de la Tran­si­tion écologique et sol­idaire, … s’élargisse encore ! Cette con­ver­gence des acteurs nour­rit le suc­cès de notre plate­forme com­mune : le Cen­tre de Ressources pour la Réha­bil­i­ta­tion respon­s­able du Bâti ancien (CREBA). Le pro­gramme « 20 pro­jets pour 2020 » avec la Banque des Ter­ri­toires, con­tribuera à dévelop­per une con­nais­sance et apportera un appui aux pro­jets de restau­ra­tion dans nos villes. Je souhaite que de nom­breuses villes et ter­ri­toires pren­nent en compte cette dimen­sion et le réchauf­fe­ment cli­ma­tique avec ses con­séquences sur la ville. Une poli­tique de la ville qui ignor­erait le réchauf­fe­ment cli­ma­tique serait demain aus­si inco­hérente qu’une poli­tique qui ne se soucierait pas des prob­lèmes de la mobil­ité. Toutes ces actions nour­riront un débat sur « Envi­ron­nement et Cen­tres anciens » que je vous pro­pose d’organiser, et qui pour­rait avoir lieu dans le cadre de notre Con­grès 2021.

La rela­tion avec les Régions est essen­tielle. Ce sont des grands acteurs du développe­ment économique, de l’aménagement du ter­ri­toire et de l’environnement, de la for­ma­tion, du tourisme et du pat­ri­moine. L’Occitanie a ouvert la voie à de fructueuses col­lab­o­ra­tions avec nous, tant dans le secteur de la revi­tal­i­sa­tion qu’en matière d’inventaires, de pro­mo­tion de l’architecture et de l’urbanisme pat­ri­mo­ni­al et du tourisme cul­turel et pat­ri­mo­ni­al. Avec la Nor­mandie, nous devri­ons sign­er un accord très prochaine­ment. Je souhaite que d’autres régions nous rejoignent con­créti­sant des réflex­ions en cours avec plusieurs d’entre elles.

Pour 50 % des vis­i­teurs, le choix de la des­ti­na­tion France se fait en rai­son d’une promesse cul­turelle et pat­ri­mo­ni­ale. Atout France, en met­tant en œuvre notre nou­velle cam­pagne « Remark­able France », ne s’y est pas trompé. La ban­nière « France, Pat­ri­moines et Ter­ri­toires d’exception » réu­nis­sant Sites & Cités remar­quables de France avec la Fédéra­tion des Parcs naturels régionaux de France, Les Plus Beaux Vil­lages de France ©, Les Plus Beaux Détours de France, les Petites Cités de Car­ac­tère © de France, le Réseau des Grands Sites de France, Ville et Métiers d’Art, nous con­duira à val­oris­er plus de 1000 des­ti­na­tions qui con­stituent un mail­lage pat­ri­mo­ni­al le plus riche et le plus divers qui soit en France. Je souhaite à ces ini­tia­tives d’avoir un écho bien au-delà de nos fron­tières et dans bien des langues dif­férentes et que notre pro­jet de grande expo­si­tion sur les grilles du Jardin du Lux­em­bourg puisse se concrétiser.

C’est aus­si à ce ray­on­nement que nos entre­pris­es parte­naires par­ticipent. EDF, depuis des années, nous a aidé à porter des actions nova­tri­ces dans nos ter­ri­toires ; plus récem­ment, le Groupe La Poste et aujourd’hui le Groupe Casi­no. Je souhaite que ces parte­nar­i­ats se dévelop­pent, per­me­t­tent des réal­i­sa­tions inno­vantes et qu’ils vien­nent ren­forcer les actions de nos membres.

Enfin, je veux souhaiter une belle année à tous nos parte­naires, cer­tains déjà cités, aux min­istères qui nous accom­pa­g­nent, aux asso­ci­a­tions, experts, uni­ver­si­taires ; aux Députés, aux Séna­teurs qui nous aident régulière­ment dans les batailles à men­er, dans les com­pro­mis à trou­ver, dans la démoc­ra­tie qu’il faut plus que jamais défendre par des valeurs mieux partagées et entretenues à l’instar de nos pat­ri­moines remarquables.

Les munic­i­pales de 2020 ver­ront la con­fir­ma­tion de cer­tains de nos col­lègues et arriv­er de nou­veaux respon­s­ables. C’est pour moi l’occasion de remerci­er celles et ceux qui ont con­sacré beau­coup de temps, d’énergie et de com­pé­tences à la vie de Sites & Cités remarquables.

Je souhaite tout par­ti­c­ulière­ment une Belle Année 2020 à nos élus, sur les épaules desquels pèse en dernière instance l’essentiel des poli­tiques pat­ri­mo­ni­ales ; à tous nos parte­naires, sans oubli­er nos col­lab­o­ra­tri­ces et col­lab­o­ra­teurs. »